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Erreur de diagnostic ou faute professionnelle ?

  • francoisbiquillon
  • 22 févr.
  • 4 min de lecture
"Moi ? Je suis juste l'une de ces figures obscures qui habitent le mystérieux monde crépusculaire où les professions médicales et juridiques se rencontrent."
"Moi ? Je suis juste l'une de ces figures obscures qui habitent le mystérieux monde crépusculaire où les professions médicales et juridiques se rencontrent."

En matière de responsabilité médicale, il est essentiel de faire la distinction entre une simple erreur de diagnostic et une faute professionnelle. En effet, une erreur dans l’évaluation de l’état du patient ne constitue pas nécessairement une faute justifiant la mise en cause de la responsabilité du professionnel de santé.

1. L’erreur de diagnostic : définition et limites

  • Définition. On parle d’erreur de diagnostic lorsqu’un médecin ou un professionnel de santé n’aboutit pas au bon diagnostic concernant l’affection du patient. Il peut s’agir d’une confusion entre deux pathologies similaires ou d’un manquement lié à la complexité du cas clinique.

  • Caractère non fautif possible. Une erreur de diagnostic n’est pas automatiquement synonyme de faute. En droit français, le juge vérifie si le praticien a respecté les règles de l’art (le standard de soins) et les connaissances médicales disponibles au moment des faits.

    Exemple : Si la maladie est très rare, ou si les symptômes sont atypiques, il est possible que malgré des recherches consciencieuses et un suivi conforme aux protocoles, le médecin n’arrive pas au diagnostic correct. Dans ce cas, il n’y a pas forcément de faute professionnelle retenue.

  • Aléa thérapeutique. L’erreur de diagnostic peut, dans certains cas, relever de l’aléa thérapeutique, c’est-à-dire d’un risque inhérent à l’acte médical ou à l’évolution de la maladie. L’aléa implique qu’aucun manquement du professionnel ne puisse être reproché (il s’agit d’un fait non maîtrisable par la médecine au moment considéré).

2. La faute professionnelle : un manquement au standard de soins

  • Définition. La faute professionnelle (ou faute médicale) suppose un comportement fautif, c’est-à-dire un manquement aux règles de l’art ou à la diligence attendue d’un professionnel de santé compétent placé dans les mêmes circonstances.

  • Critères de la faute. Pour qu’il y ait faute, plusieurs éléments peuvent être examinés :

    1. L’omission de diligences élémentaires : ne pas pratiquer un examen complémentaire pourtant requis au vu des symptômes, ignorer un résultat d’analyse, etc.

    2. Le non-respect des protocoles ou recommandations de bonne pratique émanant des autorités de santé.

    3. Le défaut d’information : ne pas informer suffisamment le patient des risques, des alternatives ou du suivi nécessaire.

    4. Le non-respect du devoir de vigilance : laisser passer des signes cliniques évidents qui auraient dû alerter tout médecin compétent.

  • Exemple concret de faute

    • Faute caractérisée : Un médecin généraliste n’adresse pas un patient à un spécialiste alors que des signaux d’alerte clairs (symptômes persistants, facteurs de risque avérés) justifiaient un examen approfondi.

    • Faute liée au diagnostic : Un radiologue interprète manifestement de manière négligente un cliché pourtant porteur d’anomalies évidentes (lésion tumorale visible). Si l’erreur est considérée comme résultant d’une inattention ou d’une incompétence flagrante, la responsabilité du praticien pourra être reconnue.

3. Comment le juge fait la distinction

Pour déterminer s’il y a seulement erreur (sans faute) ou faute professionnelle, le juge (ou l’expert désigné) va se pencher sur :

  1. Les moyens employés par le professionnel

    • A-t-il demandé les examens complémentaires nécessaires au regard des symptômes ?

    • A-t-il respecté les protocoles diagnostiques en vigueur ?

    • A-t-il consulté, si besoin, un autre spécialiste (médecin, radiologue, biologiste, etc.) ?

  2. Le degré de complexité du cas clinique

    • S’agit-il d’une pathologie rare, atypique ou difficile à diagnostiquer ?

    • Le médecin disposait-il d’indices suffisamment clairs pour poser un diagnostic différent ?

  3. La connaissance médicale au moment des faits

    • Certaines maladies ou syndromes peuvent être mal connus ou récemment décrits ; le diagnostic peut donc être difficile.

  4. Le comportement global du médecin

    • Y a-t-il eu un suivi régulier et adapté après la première consultation ?

    • A-t-il réagi aux alertes ou aux plaintes réitérées du patient ?

4. Conséquences en termes de responsabilité

  • En cas de simple erreur de diagnostic sans faute. Le patient ne pourra en principe pas obtenir d’indemnisation pour faute du professionnel de santé, puisque le praticien a agi conformément aux données acquises de la science médicale et n’a pas commis de manquement.

    Dans ce cas, la notion d’aléa thérapeutique (risque imprévisible et non fautif) peut être envisagée, ouvrant parfois droit à réparation par les dispositifs d’indemnisation spécifiques (ONIAM en France, sous certaines conditions).

  • En cas de faute professionnelle avérée. Le patient pourra engager la responsabilité civile (et éventuellement pénale si la faute est grave) du praticien, et obtenir des dommages-intérêts pour réparer le préjudice subi (perte de chance, préjudice corporel, moral, financier, etc.).

    La charge de la preuve incombe généralement au patient (ou à ses ayants droit), bien que les expertises médicales soient souvent décisives pour éclairer le juge.

5. Points clés à retenir

  1. Pas d’amalgame systématique : Toute erreur de diagnostic n’est pas nécessairement une faute.

  2. Standard de soins : La référence est le comportement qu’aurait adopté « un bon praticien » dans les mêmes circonstances.

  3. Preuve de la faute : Elle se fonde sur les actes (ou omissions) contraires aux règles de l’art médical.

  4. Expertise médicale : Souvent cruciale pour éclairer le juge sur la nature de l’erreur, son caractère fautif ou non, et les conséquences pour le patient.

En conclusion

  • Erreur de diagnostic : Peut être le résultat d’une difficulté objective, d’une présentation atypique de la maladie ou d’un aléa non maîtrisable.

  • Faute professionnelle : Suppose un manquement avéré aux règles de l’art ou à la diligence attendue, qui aurait pu être évité par un praticien normalement compétent et prudent.

La frontière entre simple erreur et faute repose essentiellement sur l’examen de la conduite du médecin, des moyens mis en œuvre et du respect (ou non) des standards de la profession.

o1-pro

 
 
 

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